Il m’est plus difficile que ce que je pensais que de me replonger dans les souvenirs de ma mission humanitaire. Non pas que ceux-ci aient été négatifs, loin de là, mais c’est là une expérience si propre à chacun qu’il est compliqué d’y apposer des mots. Je pense que le mieux est de raconter simplement mon aventure et de laisser les mots parler d’eux-mêmes.
En juin 2015, j’allais vers mes 20 ans et, malgré mon jeune âge, cela faisait bien des années déjà que je cherchais à m’investir dans l’humanitaire. Pour y trouver un but, un sens et par là, une identité. Je ne pouvais concevoir de vivre une vie banale, il me fallait agir et me trouver une utilité pour finalement ne pas connaître une existence vaine. En un sens, c’est une forme d’égoïsme qui m’a poussé à partir en Bolivie.
Après une année à avoir organisé divers évènements et démarché nombre de sponsors, le Bureau de l’Humanitaire de l’EM Strasbourg, dont j’étais membre actif, avait réuni le budget nécessaire pour faire partir une délégation de quinze étudiants. J’ai eu la chance d’être sélectionné pour en faire partie.
Alors nous partîmes, nous quinze, pour une aventure que nous avions tous choisi de vivre. Certains pour faire une bonne action avant de rentrer dans la vie active, d’autres pour rendre au monde ce qu’eux ont eu, et enfin certains qui, comme moi, se cherchaient alors.
Un mois est un temps trop court passé au bout du monde à vivre parmi les locaux et à travailler à leurs côtés. Nos semaines, nous les passions dans l’orphelinat Maria Cristina à travailler à la construction d’une salle de motricité pour les enfants en situation de handicap, enfants que nous participions aussi à encadrer. Ainsi, pendant que la moitié de notre groupe trimait sur le chantier, l’autre moitié assistait les aides-soignants avec les enfants.
Je me rappellerai toute ma vie du premier jour à Maria Cristina. Je n’ai jamais été à l’aise avec les enfants, même en France, et je n’ai jamais été familier du handicap auparavant. Je me revois me demander comment ferai-je pour les aider. Alors je passais le plus clair de mon temps sur le chantier, là où j’étais en territoire connu.
Mais avec les années, je le regrette quelque peu. Car malgré mes doutes et mes maladresses, l’amour et la simplicité des enfants de Maria Cristina a su me toucher plus que de raison. Je m’en rappelle que, dès notre arrivée et chaque jour qui suivait, ils nous appelaient « tio », « tia » (oncle/tante), heureux de déjà nous revoir.
Au moment où notre œuvre fut achevée, et que l’heure des adieux sonnait, j’étais pantelant de joie, de tristesse et de mélancolie. Une partie de moi est restée là-bas où les enfants rient d’un amour simple et sans fioriture.
Alors, quand nous nous revîmes pour la dernière fois, nous chantâmes sur un air du Temps des Cathédrales, que notre œuvre était accomplie et qu’il nous fallait repartir, le cœur léger. Que nous n’oublierons jamais ce qui avait été vécu et accompli ici.
Et désormais, quand je doute, je me rappelle que quelque part, à l’autre bout du monde, se trouve une salle que j’ai en partie bâti de mes mains et qui sert tous les jours à des enfants qui la méritent.
Personnellement, j’en ai tiré énormément, bien plus, je crois, que ce que je n’ai jamais donné. Car désormais je sais que c’est la voie que je veux emprunter et que c’est en venant en aide aux autres que je m’accomplirai réellement. Je sais que jamais je ne me contenterai d’une fiche de paie et d’un emploi régulier alors que je pourrais être là-bas. J’en ai aussi tiré des amis exceptionnels que j’aime à revoir dès que j’en ai la chance. Une aventure, des souvenirs et un pacte tacite nous a lié à jamais, je crois. Et aujourd’hui, je m’apprête à repartir découvrir les beautés du monde pour, dans mes textes et via mes images, les partager.
Inspiré(e) par cette mission, envie de rejoindre l’aventure ?